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Catégorie : Vie et Sciences de l'Entreprise 195/196

Vie et Sciences de l'Entreprise 195-196Résumé :
La contraction des principaux indicateurs macroéconomiques et macrofinanciers depuis 2008 témoigne d’une dégradation généralisée et durable de la croissance française. Ce climat n’est pas pour autant spécifique à d’autres crises financières. Le patrimoine financier des ménages français, au regard de la dernière enquête INSEE (2010), témoigne à nouveau d’un redéploiement des actifs vers des placements moins risqués. Mais la récente crise semble traduire un besoin de transparence, de compréhension et d’utilité dans l’épargne allouée au marché financier. L’explosion de placements financiers qualifiés de responsables, au sens de Glémain (2010), interpelle quant à l’appropriation durable par les épargnants des spécificités de ces actifs. Cet article pose la question de la pérennité de ce trend sectoriel haussier. S’agit-il d’une véritable prise de conscience collective vis-à-vis d’une finance plus responsable ? Ou bien uniquement d’un effet opportun et conjoncturel au regard de certaines caractéristiques de ces actifs en temps de crise ?

Mots clés : Finance responsable, finance éthique, finance solidaire, crise financière, structuration sectorielle

Abstract:
The contraction of key macroeconomic and macro-financial indicators since 2008 reflects a widespread and lasting deterioration of the French growth. The financial wealth of French households, with regard to the last INSEE survey (2010), shows again a redeployment of assets in favor of less risky investments. But the recent crisis seems to reflect a need for transparency, understanding and utility to savings allocated in the financial market. Theexplosion of qualified responsible financial investments as defined by Glémain (2010), calls out as for the investors’ sustainable appropriation of these assets’ specificities. This article raises the issue of the durability of this sector bullish trend. Is it a true collective awareness vis-à-vis a more responsible finance? Or is it only a short term and timely effect with regard to some characteristics of these assets in the time of crisis?

Keywords: Responsible finance, ethic finance, social finance, financial crisis, structuring sector

Introduction

La dernière crise financière a mis en avant des comportements changeants quant à la répartition du patrimoine financier des ménages français (INSEE, 2010). L’allocation des actifs inclut un aspect conjoncturel afin de minimiser le risque de perte de valeur de son capital, induite par les tensions sur le marché financier. Mais cette évolution dans un contexte incertain a pu interpeller quant aux modalités adoptées vis-à-vis de la gestion de son patrimoine financier. Celui-ci est venu côtoyer un phénomène plus structurel dans l’émergence d’une finance dite responsable. Une augmentation significative des encours responsables s’est ainsi manifestée à partir des premières turbulences financières de 2008 pour être confortée jusqu’à aujourd’hui encore. Cet article souhaite questionner sur la pérennité d’une telle dynamique d’origine conjoncturelle. L’appropriation d’actifs financiers responsables, dans un contexte de crise financière, traduit-elle une véritable prise de conscience du rôle que peut jouer la finance sur l’économie réelle ? Ou bien s’agit-il uniquement d’un effet opportun des épargnants au regard de certaines caractéristiques de ces actifs ? Même s’il apparait difficile de statuer clairement sur cette problématique, la véracité de ces deux hypothèses conditionnera in fine le degré de structuration de ce secteur à terme. Les ménages français ont pu interpeller les acteurs de la finance vis-à-vis d’un besoin grandissant de transparence, de compréhension et d’utilité de leur l’épargne. Cette tendance orienterait-elle vers une évolution, voire une révolution, dans la façon même dont est structuré le marché financier ?

Afin de mener à bien ce travail, il convient de rappeler l’historique récent de la finance responsable en France. Les acteurs professionnels utilisent majoritairement la définition de Glémain (2010) qui la décrit comme la répartition entre la finance dite éthique (avec la Responsabilité Sociétale des Entreprises) et la finance dite solidaire. La finance dite responsable est une réalité, en ce sens où elle est une sous-composante du secteur financier (les modalités d’allocation y sont différentes, pour autant c’est bien une épargne venant financer des projets). Des données de deux institutions seront largement utilisées puisqu’elles font références en France dans le domaine : Novethic et Finansol. Ce travail permet de quantifier l’évolution haussière des encours du secteur depuis plusieurs années. Ces éléments viendront illustrer la récente dynamique conjoncturelle du secteur de la finance responsable, à l’origine de nombreuses questions quant à la capacité à pérenniser ce trend haussier. Il s’en suivra un travail de compréhension des spécificités des actifs considérés comme responsables (qu’ils soient solidaires ou éthiques).

L’attrait pour ces actifs, et plus encore en temps de crise, peut résulter de caractéristiques qui leur sont propres. La revue de littérature dans le domaine, conforté par une analyse de données récentes en France, permettra de mettre en avant des aspects de stabilité, de rentabilité et de valeurs sociétales fortes les caractérisant. Ces éléments seront nécessaires pour une meilleure compréhension de la problématique soulevée : l’augmentation de leurs encours est-elle liée à une volonté de sécuriser son patrimoine financier (les actifs responsables y apparaissent plus stables et aussi rentables à moyen terme) et/ou s’agit-il d’un besoin de donner du sens à son épargne ? Les caractéristiques d’un actif ne pouvant justifier à lui seul l’attrait pour ce type de placements financiers, une démarche exploratoire vient qualifier la structuration du secteur par une méthodologie plus qualitative (tout travail quantitatif est apparu difficilement envisageable : pas de données spécifiques sur le patrimoine financier des ménages, pas d’études sur le profil des épargnants français responsables…).

1 – Description et contextualisation de la finance responsable en France

1.1 – Une approche pragmatique dans la définition adoptée

Dans un monde en profonde mutation, la sphère financière a été globalisée et mondialisée afin de faciliter et donc d’amplifier la mise en relation entre épargnants et investisseurs. Une certaine complexification a pu y naitre, mettant sous tension les dimensions économiques, sociales et environnementales principalement. Bien qu’historiquement dédiée à un positionnent religieux, la finance responsable est venue se développer plus largement dans le contexte récent de crises récurrentes des marchés financiers afin d’envisager différemment les modalités organisationnelles du secteur. Ce lien que peut créer la finance s’est vu qualifié de responsable voire d’éthique ou solidaire, lorsque certaines valeurs défendues par des organisations ont pu émerger dans la façon de collecter puis d’utiliser cette épargne. Pour autant, la finance responsable aborde de nombreuses définitions qu’il convient de parfaire afin de structurer au mieux la démarche de ce travail.

Il est difficile de trouver un consensus quant aux caractéristiques d’une finance dite responsable. Certains vont la définir comme la composante d’une finance solidaire et d’une finance éthique : « Nous abordons la finance responsable comme une innovation théorique en économie financière, soulignant ainsi la distinction factuelle et conceptuelle entre le modèle de la finance éthique liée à la responsabilité des entreprises (RSE), et celui de la finance solidaire pour un autre modèle de développement durable, socialement soutenable ». (Glémain, 2010). D’autres, iront jusqu’à différencier la finance dite éthique de l’Investissement Socialement Responsable (ISR) : « (…) même si certains les confondent, il est pertinent de distinguer l’investissement éthique, auquel on peut attribuer une connotation morale, de l’investissement socialement responsable, qui évoque la dimension et les impacts sociaux de tout investissement. » (Gendron & Bourque, 2003). Pour autant, le débat reste ouvert « Premièrement, certains la considèrent comme le prolongement de l’économie classique vers une clientèle exclue du secteur bancaire ; deuxièmement, certains estiment qu’elle se situe dans le prolongement de la politique sociale et qu’à ce titre elle doit être soutenue financièrement par les pouvoirs publics ; troisièmement, certains acteurs de la finance solidaire se définissent comme des agents de l’économie sociale dont la singularité consiste à produire des externalités positives ; enfin, certains acteurs affirment occuper un champ d’action à part et entièrement novateur. » (Belkacem & al., 2004).

Il apparait délicat de s’approprier une définition de la finance responsable connue et reconnue par tous les acteurs. Son périmètre évolue surtout suivant les enjeux que l’on peut lui attribuer quant à la notion de responsabilité à la finance. Il n’y a pas qu’une seule approche ni une seule définition : c’est un peu comme le développement durable. Ainsi, on adoptera celle qui est aujourd’hui utilisée par la profession financière. La finance responsable y est décomposée en 2 composantes : la finance dite éthique (les pratiques dans l’entreprise financée sont éthiques mais pas obligatoirement sa finalité) et la finance dite solidaire (la finalité de l’activité de l’entreprise financée est d’être solidaire). L’approche la plus pertinente au regard de la problématique développée porte sur l’intérêt dans l’acte d’épargner afin d’orienter l’investissement in fine effectué. La stratégie adoptée est de comprendre les modalités d’allocation de l’épargne des Français en temps de crise, donc d’appréhender leur comportement d’épargne. Il s’agit bien d’un choix pouvant être qualifié de sociétal et engagé vis-à-vis du sens à apporter à son épargne. Ces éléments orientent logiquement à l’intégration d’aspects économiques et sociologiques propres aux choix des épargnants dans la répartition de leur patrimoine financier. In fine, il conviendra de prendre en aval ces caractéristiques afin de pallier la répartition des actifs financiers des épargnants français en temps de crise, et plus spécifiquement des actifs responsables.

Ainsi, et pour des raisons pratiques quant à la réflexion menée ici, nous nous approprions la définition de la finance responsable au sens de Glémain (2010), se différenciant entre la finance éthique (au sens de l’ISR) de celle de la finance solidaire. Cette structuration est aujourd’hui celle communément adoptée par les acteurs professionnels à travers deux institutions représentatives du secteur. La finance éthique (à travers l’ISR) est aujourd’hui organisée autour de Novethic qui propose un label, communique autour d’études thématiques, de conférences… Quant à la finance solidaire, elle est structurée par Finansol qui porte aussi un label, un baromètre, un observatoire… Pour autant, ces deux différenciations ont en commun le même objet : « La finance responsable est ainsi composée de deux univers ; celui de la finance éthique et celui de la finance solidaire. Si le premier relève de l’économie morale et le second de l’économie solidaire, leur différence commune est celle d’être au service d’un certain projet de développement durable innovant à l’échelle locale comme internationale, respectueux de l’environnement, des clauses et normes sociales, et prônant une autre gouvernance d’entreprises. » (Glémain, 2010)

1.2 – Une évolution favorable des encours en France

 Durant la récente crise économique et financière, nous avons pu avoir une amplification des encours affectés à la finance responsable (qu’elle soit éthique ou solidaire). Les deux institutions que nous avons pu présenter précédemment, Novethic et Finansol, sont aujourd’hui à même de fournir des données chiffrées quant à cette évolution, mais aussi dans leurs répartitions. Il y a actuellement 149 milliards d’euros d’encours qualifiés d’ISR par Novethic (2013) et 3,5 milliards de fonds définis de solidaires par Finansol (2011). Ces chiffres, certes toujours plus importants au cours du temps, questionnent quant au profil de ces épargnants. Actuellement, très peu d’études dans le domaine permettent d’identifier les réelles motivations de ces épargnants « responsables ». Ainsi, afin de parfaire les caractéristiques de ces actifs financiers, il convient d’y présenter en parallèle les conditions d’attribution des labels de ces deux structures pour en comprendre les enjeux. La qualification d’un actif éthique ou solidaire par ces deux structures se traduit par le respect de leurs critères propres (uniquement par la labélisation pour Finansol et par l’estimation des pratiques ISR ainsi que par la labélisation dans la gestion des encours par Novethic). Il est donc sous-entendu que les données des encours proposés ici ne concernent que ceux définis au sens de ces deux institutions.

Finansol a pu labéliser 122 produits financiers en 2012. Il estime ainsi à 900 000 le nombre d’épargnants solidaires en France au 31 décembre 2011 (Finansol, 2012). Les critères de son label Finansol sont définis suivant le degré de solidarité, de transparence et d’information, de promotion active des placements et d’appropriation d’une méthodologie pertinente dans l’utilisation de l’épargne vers les projets solidaires. L’évolution des encours labélisés Finansol a été importante depuis 2007, notamment vis-à-vis de l’épargne investie chez les financeurs solidaires, l’épargne bancaire et l’épargne salariale (tableau 1). Les encours sont utilisés pour les objectifs solidaires suivants : emploi ; environnement ; logement et social ; solidarité internationale.

Tableau 1 : Encours de l’épargne solidaire (au 31/12/2011, en millions d’euros)

En cours de l'épargne solidaire au 31/12/201, en millions d'Euros
Source: Finansol 2012 (ces chiffres sont issus des produits financiers labélisés Finansol ainsi que les fonds d’épargne salariale non labélisés.)

 Novethic a pu connaitre une évolution de 69 % des encours ISR en 2011 avec 115 milliards d’euros et de 29 % en 2012 avec 149 milliards d’euros (Novethic, 2013). Il y a actuellement 109 fonds ISR labélisés Novethic pour un montant de 20 milliards d’euros. Son label prend en considération l’analyse environnementale, sociale et de gouvernance ; la transparence du processus ; le reporting extra-financier de qualité ; la publication de la composition intégrale du portefeuille. L’évolution des encours ISR sur le marché français a considérablement augmenté en triplant quasiment les encours entre 2008 et 2011. Un ensemble d’indices extra-financiers a été créé afin d’aider les fonds ISR à choisir des placements. Ceux-ci ont toute liberté dans la sélection des actifs composant leur fond. Ainsi, les indicateurs qualifiés d’ESG (Environnemental, Social et de Gouvernance) propres à l’ISR peuvent être différents suivant les sociétés de gestion (tableau 2). Ce travail permet d’informer et de vérifier in fine les pratiques éthiques définies par les fonds ISR (Novethic, 2013).

Tableau 2 : Liste des indicateurs ESG publiés par les sociétés de gestion

Liste des indicateurs ESG publiés par les sociétés de gestion

Source : Novethic, 2013

1.3. des éléments favorables d’ordre structurel

L’argumentation ici présentée n’a pas pour objet de décrire les caractéristiques des actifs financiers responsables en tant que tels. Il ne s’agit pas de spécificités propres à ces fonds, mais plutôt liées à un contexte socio-économique venant expliquer pour partie l’évolution favorable de la finance responsable en France. Les principaux éléments d’ordre structurel sélectionnés sont ceux reposant sur l’attrait historique des Français dans des placements peu risqués et le rôle d’une fiscalité favorable qui a été dédiée à certains produits responsables. Ce travail a souhaité questionner l’attractivité des fonds responsables lors de la récente crise financière de 2008. Le niveau d’appropriation du risque dans des placements financiers et la nature de la fiscalité de ces placements n’ont pu justifier cette évolution puisqu’ils n’ont pas véritablement évolué avant, pendant et après la crise financière de 2008. Cependant, des modifications sont possibles à terme. L’impact pourra y être significatif sur le montant des fonds responsables. Mais il s’agira d’une évolution structurelle et liée à l’environnement socio-économique en France, non d’une caractéristique conjoncturelle en temps de crise propre à ces produits financiers.

L’approche en termes de fiscalité n’est pas la même entre la finance solidaire et la finance éthique (qualifiée d’ISR). Les dispositifs d’ISR n’ont pas véritablement de spécificités fiscales favorables. Le régulateur laissant supposer que l’ISR n’est pas un sous-compartiment du marché financier, mais bien une tendance de fond dont l’ensemble des acteurs s’appropriera les meilleures pratiques. La fiscalité des fonds éthiques est ainsi la même que pour tous les autres produits financiers. Le financement d’activités solidaires pouvant être plus complexe (encadrement plus important du personnel en réinsertion, développement d’activités dans des champs peu rémunérateurs…), le législateur a pu favoriser des dispositifs fiscaux plus favorables. Le tableau 3 synthétise les différents dispositifs fiscaux bénéficiant aux produits financiers qualifiés de solidaires. On peut y voir que de nombreux actifs en bénéficient (produits bancaires, fonds d’épargne solidaire et actions d’entreprises solidaires). Cet élément est à prendre en compte dans la rémunération finale de ces actifs puisque les déductions fiscales, in fine, peuvent venir surperformer ces placements (Arrondel & al., 2011). Il n’est pas sûr, dans le contexte actuel d’austérité budgétaire des principaux gouvernements, d’avoir des dispositifs fiscaux toujours aussi favorables. Toute évolution de la fiscalité proposée aux ménages français pourra impacter les montants alloués à ces fonds responsables.

Tableau 3 : Synthèse des dispositifs fiscaux relatifs aux produits solidaires

 Synthèse des dispositifs fiscaux relatifs aux produits solidaires
Source : Site internet du gouvernement sur la finance solidaire (dossier réalisé en 2013 par lafinancepourtous.com) http://www.economie.gouv.fr/facileco/finance-solidaire

L’instabilité du prix des encours financiers est un risque important, souvent néfaste à la pérennité des placements des ménages financiers français. Le tableau 4 vient démontrer la tendance d’une gestion maitrisée des risques financiers avec une évolution de +7,3 % entre 2000 et 2010 des actifs de risque 1 (les plus faibles), alors même que ceux-ci étaient déjà largement majoritaires (entre 75 et 80 % des actifs des ménages). L’attrait significatif pour plus de stabilité, en parallèle de l’augmentation des encours responsables, qu’ils soient solidaires ou éthiques, vient questionner sur l’intérêt que peuvent porter les ménages français vis-à-vis de ces actifs. Cet argument est d’autant plus pertinent qu’un peu moins de la moitié des encours financiers des ménages français (soit 45 % des encours en 2007) sont placés dans des produits non risqués bénéficiant d’avantages fiscaux (Garnier & Thesmar, 2009). Ces deux variables, la fiscalité et l’aversion pour le risque, même si elles n’expliquent pas l’évolution conjoncturellement favorable des encours responsables lors de la récente crise de 2008, orientent malgré tout à se les approprier dans la répartition socio-économique de l’épargne financière des ménages français.

Tableau 4 : Définition des classes de risque et poids de chacune d’entre elles dans le patrimoine financier des ménages (poids en % et écarts en points)

Définition des classes de risque et poids de chacune d’entre elles dans le patrimoine financier des ménages (poids en % et écarts en points)

(*) Va à l’ensemble des canaux de distribution.
(**) Y compris celles détenues en direct dans le cadre de l’épargne salariale.
Sources
 : AMF, 2011, Risques et tendances – n° 10, Mai 2011.

Les spécificités de la finance responsable dans la revue de la littérature

 

2.1. une volatilité financière des actifs plus faible

La plus forte stabilité des fonds responsables se justifie théoriquement par une meilleure gestion des risques à terme. La volonté d'appliquer une politique sociétale forte, orientée vers les dimensions ESG pour la finance éthique et de création d’emploi, d’environnement, de logement et social, de solidarité internationale pour la finance solidaire, a plus de chance d’instaurer un climat de confiance entre l’ensemble des parties prenantes (actionnaires, salariés, fournisseurs, clients…). « Selon ses ardents défenseurs, celle-ci représenterait un avantage concurrentiel. En adoptant un comportement fondé sur les nouvelles relations avec les stakeholders et sur l’innovation pour les clients, la société accroît la valeur de son image de marque. La valeur de son image serait donc supérieure si elle peut démontrer l’équilibre entre les aspects financiers, environnementaux et sociétaux (…) » (Le Saout, 2006).

Ce type de politique sociétale peut justifier une plus forte implication en amont de ces structures vis-à-vis des défis sociétaux futurs, démontrant une démarche innovante dans les réponses à apporter. Elles viennent témoigner d’une capacité à être actives et donc plus prospères, voire stables in fine.
« Ainsi, une notation ESG élevée témoigne généralement d’une société bien gérée, peu susceptible d’être mêlée à des controverses majeures ou d’être confrontée à des risques opérationnels ou réglementaires significatifs, et donc de compromettre la réputation de l’investisseur ou du gérant. (… ;) ; ces filtres peuvent – s’ils sont bien conçus – également promouvoir de meilleures pratiques réduisant ou limitant à terme les externalités sociales et environnementales » (Butz & Nguyen, 2007). Cette vision a été renforcée par la dernière étude thématique effectuée par Novethic (graphique 1). « On observe, depuis trois ans, une montée en puissance de la notion de maîtrise de risques de long terme dans l’intérêt que portent les investisseurs institutionnels à l’intégration de critères ESG (…). La prise en compte de critères ESG n’est plus forcément associée aux investissements « éthiques », mais plutôt à la nécessité de disposer d’une analyse plus complète des titres. » (Novethic, 2012).

Pour autant, d’autres éléments viennent contester cette approche où des démarches responsables apparaitraient contraignantes, donc pénalisantes dans la capacité à stabiliser équitablement les encours. Jégourel & Verdié (2012) en ont décrit les principales raisons. Les critères discriminants permettant de qualifier des fonds responsables limitent le champ des possibles vis-à-vis des investissements potentiels, engendrant des contraintes de diversification et donc amplifiant la volatilité financière théoriquement. Le coût de diffusion de l’information afin d’attester de la bonne implication dans des projets sociétaux peut contraindre la stabilité des encours au moins à court terme (mise en place du processus notamment). Les investisseurs peuvent aussi retirer à leurs grés les capitaux investis dans les structures qualifiées de responsables sans pour autant justifier la raison de ce choix. Mais ce risque apparait faible puisque les investisseurs responsables apparaissent plus loyaux (ils ont plutôt tendance à laisser leurs encours à moyen terme).

 

Graphique 1 : Eléments justifiant l’adoption d’une stratégie ESG d’après un panel d’une centaine d’investisseurs institutionnels européens

Eléments justifiant l’adoption d’une stratégie ESG d’après un panel d’une centaine d’investisseurs institutionnels européensSource : Novethic 2012

2.2. une rentabilité à moyen terme tout aussi satisfaisante

La question de la rentabilité financière est un aspect important puisqu’elle conditionne in fine l’intérêt pour ce type d’actif. La finance responsable n’est pas du don, mais bien un investissement dans des produits financiers avec une volonté de rentabilité a minima (idéalement, la préservation du capital alloué est demandée). Des comportements différenciants peuvent apparaitre vis-à-vis de la finance classique, notamment par une pression moindre sur la rentabilité à court terme. Ce positionnement apparait cohérent au regard des dimensions sociétales à incarner par les fonds, reposant souvent sur une stratégie à moyen terme. Des divergences entre la finance éthique et solidaire apparaissent évidemment puisqu’elles n’ont pas tout à fait la même structuration. « Contrairement à l’épargne solidaire ou de partage pour lesquelles l’investisseur peut accepter dès l’origine la perspective d’une moindre rémunération, l’investisseur socialement responsable conserve comme objectif principal le profit. » (Bayard & al., 2002).

L’approche théorique interpelle quant à la capacité de cette finance responsable à côtoyer des rentabilités satisfaisantes au moins à moyen terme. « D’un point de vue théorique, l’investissement socialement responsable devrait sous-performer les investissements traditionnels dans la mesure où les portefeuilles ISR sont des sous-ensembles d’univers d’investissements, le coût du risque impliquant un abaissement de la frontière d’efficience. » (Le Saout, 2006). Mais l’inclusion de critères extra-financiers fait apparaitre des évolutions favorables dans la rentabilité financière. L’étude de l’UNEP publiée en 2007, « Demystifying Responsible Investment Performance », a pu lister l’ensemble des travaux portant sur la question de la rentabilité des fonds responsables. L’étude récente de Kheli, Ninet et Rezgui (2010) vient conforter à travers une étude comparative la pertinence d’une stratégie « responsable » en constituant des échantillons comparatifs. Même si ces travaux s’orientent plus vers l’analyse de fonds ESG, plus facile à traiter puisqu’ils sont cotés sur les marchés financiers, cette remarque apparait tout aussi pertinente pour les fonds solidaires. Le tableau 5 vient dresser les taux de rentabilité des actifs financiers labélisés Finansol de ces dernières années. Il n’y apparait pas de sous-performance significative de ces fonds. Des biais peuvent néanmoins apparaitre quant aux conclusions de ces résultats, notamment vis-à-vis des critères d’exclusion, orientant dans un sens ou dans un autre les résultats des gestionnaires.

Au final, les éléments expliquant cette rentabilité à moyen terme se justifient par une politique sociétale plus intense et donc porteuse de fruit dans l’aptitude à innover pour ces structures. Elles conditionnent ainsi leur capacité à être aussi profitables à moyen terme par la pertinence que peut incarner leur stratégie organisationnelle. Cette dimension est intéressante puisqu’elle est aussi mise en avant par les fonds d’investissement. Pour un épargnant français, il peut apparaitre pertinent d’allouer son épargne en lui donnant du sens si en plus la rentabilité espérée a minima reste acceptable.

Tableau 5 : Les performances financières en 2011 des fonds Finansol

Les performances financières en 2011 des fonds FinansolSource : Finansol 2012

2.3. des actifs créateurs de valeur sociétale

La troisième caractéristique que l’on attribue à la finance responsable est celle de la création de valeur sociétale. Le contexte économique et financier est venu interpeller les acteurs dans le rôle que pouvait avoir leur épargne. L’acte d’épargner n’apparait plus neutre dans la façon in fine d’utiliser ces liquidités sur le marché financier. La finance responsable met en avant ces dimensions sociétales, comme peuvent le faire Novethic et Finansol (graphique 2). Ces éléments ne sont pas uniquement le fruit d’un positionnement spécifique du secteur de la finance responsable, bien au contraire. L’analyse des retombés de la presse économique française à ce sujet est aussi éloquente quant à l’orientation potentielle des actifs financiers vers ces placements qualifiés de responsables lors de la récente crise.

Afin de refléter cette tendance lors de la récente crise, un travail d’agrégation de mots reflétant la finance responsable en France a été effectué. L’intérêt est de contextualiser la prépondérance de la thématique de la finance responsable au quotidien auprès du grand public. Les mots sélectionnés ont été les suivants : fonds éthiques ; fonds éthique ; finance solidaire ; finances solidaires ; finance éthique ; finances éthiques ; ISR ; investissement socialement responsable ; finance participative ; finances participatives ; fonds solidaire ; fonds solidaires ; produits financiers solidaires ; produit financier solidaire ; produit financier éthique ; produits financiers éthiques ; produits financiers responsables ; produit financier responsable. Le graphique 3 illustre l’amplification de cette thématique dans la presse française, reflétant une demande accrue de transparence, de compréhension et d’utilité de leur l’épargne. Il s’agit de s’interroger sur la pérennité de cet effet conjoncturel lors de l’après-crise. Au regard des tensions financières internationales, les valeurs portées par la finance responsable se font plus facilement l’écho dans les médias. Mais il n’est pas sûr, lors de l’après crise, qu’il en soit de même.

Graphique 2 : Pratiques d’exclusions des principaux investisseurs ISR européens

 Pratiques d’exclusions des principaux investisseurs ISR européensSource : Novethic 2012.

Graphique 3 : Récurrence de la finance responsable dans la presse économique française

 Récurrence de la finance responsable dans la presse économique française
Source : Calcul auteur d’après Factiva

Une démarche exploratoire pour une meilleure compréhension sectorielle de la finance responsable

 3.1. justification méthodologique de la démarche

 

Le type de problématique oriente à questionner la configuration actuelle du secteur de la finance éthique et solidaire en France. Le choix méthodologique s’est orienté vers la réalisation d’un entretien de groupe auprès du Responsable de l’Observatoire de la Finance Solidaire de Finansol (Frédéric Fourrier) et du Responsable de la Recherche ISR à Novethic (Dominique Blanc). Leurs connaissances du secteur bien avant la récente crise de 2008, la nature de leurs activités et la complémentarité de leurs actions viennent conforter la pertinence d’un tel choix. « Dans cette optique, il est légitime de penser qu’un chercheur pose sa réflexion jusqu’à la modélisation, organisant ses données de façon plus ou moins structurée afin de rendre compte de la réalité étudiée dans les composantes constitutives et dans la dynamique des interactions entre les différentes composantes. » (Baribeau, 2009). La démarche de l’entretien de groupe se doit d’interpeller le cadre théorique structuré en amont par la revue de la littérature. Quant à la méthodologie appliquée au traitement de données brutes issues de l’entretien de groupe, c’est celle de L’Ecuyer (1989) qui a été sélectionnée. Elle se compose de 4 étapes qu’il peut convenir de lister : l’appropriation du contenu : processus de lecture flottante de l’entretien afin de prendre en considération l’ensemble de la dynamique de l’entretien (logique des discours individuels et du discours du groupe) ; la transcription du contenu : comment convient-il de retranscrire l’entretien ? Sous forme de synthèse ? Sous forme de points clefs ? La nature et la dynamique des échanges doivent permettre d’apprécier au mieux le choix à effectuer ; le choix de l’unité d’analyse : convient-il de travailler sur des mots, des phrases, des paragraphes ? C’est au chercheur de sélectionner à nouveau la méthodologie la plus pertinente. Enfin, la sélection des outils de codage : le processus de retranscription doit se faire dans un cadre opérationnel permettant de mettre en lumière le plus facilement possible les éléments issus de l’entretien. L’élaboration d’une grille de lecture est apparue des plus pertinente/cohérente.

Au regard de la problématique soulevée et de l’objet de l’entretien de groupe, l’auteur a opté pour une sélection méthodologique cherchant à mettre en avant les divergences et convergences des deux intervenants afin de spécifier les enjeux du secteur de la finance responsable. « Les catégories peuvent aussi donner naissance à des thématiques où l’analyse cherche à distinguer des convergences, des divergences. Chaque pôle est ainsi caractérisé, synthétisé et mis en contraste avec les autres » (Duchesne & Haegel, 2005 ; dans Baribeau, 2009). Ainsi, nous chercherons à conforter la problématique à travers le cadrage théorique qui a été amené en amont vis-à-vis de la structuration de la finance responsable en France lors de la récente crise de 2008.

3.2. synthèse des principaux éléments de l’entretien de groupe

Expérience des intervenants

Les deux intervenants ont pu évoluer professionnellement en même temps que le secteur de la finance responsable en France. Il n’y avait pas véritablement de formations spécifiques à l’époque : 1er DESS RSE à Paris 12 et ingénieur généraliste Arts & Métiers. Ils ont participé à des expériences professionnelles novatrices/innovantes : 1ere structure de notation extra-financière, 1er traitements de bases de données concernant le développement durable et la qualité. Ils ont tous les deux une expérience significative dans le secteur financier en général : assurance vie, CDC, Ethifinance…).

Activités des intervenants aujourd’hui

 Ils travaillent tous les deux dans des activités d’observation et d’anticipation des évolutions du secteur de la finance responsable : dans la production statistique du secteur, dans l’appui technique aux comités des labels, dans la réalisation d’études thématiques quantitatives et qualitatives (détection des meilleures pratiques du secteur, profil des épargnants solidaires…).

 

Relations entre Finansol et Novethic

Les deux structures ont un niveau proche de fonctionnement (budget et nombre de salariés comparables par exemple). Ils ont un partenaire commun prépondérant : la CDC. Il y a des activités partagées entre Finansol et Novethic (tous deux participent aux comités de leur label depuis au moins 5 ans, chacun met en avant l’autre lors de communiqués de presse en jouant sur le rôle de complémentarité…).

La situation du secteur d’avant crise financière de 2008

La finance solidaire est un mouvement de fond depuis les années 1980 avec des profils très engagés/militants (création du label Finansol dès 1997). Mais ce mouvement reste modeste et spécifique. La réglementation de 2001 relative à l’épargne salariale vis-à-vis du financement des entreprises solidaires et de l’Economie Sociale et Solidaire a permis de structurer le secteur. Quant à la finance éthique, il y a eu des difficultés dans l’acceptation par le marché du label Novethic (création du label en 2008). Pour autant, Novethic avait anticipé ce besoin de différenciation bien avant la crise (élément d’aide à la structuration du secteur), démontrant une démarche proactive sur les besoins émergents du secteur.

La situation du secteur pendant la crise financière de 2008

Concernant les fonds solidaires, il y a eu une forte augmentation des fonds labélisés par des institutions non militantes et non ESS afin de restaurer une image de confiance et d’engagement citoyen. Des actions ont été mises en place afin de créer plus de liens entre les acteurs historiques solidaires et ceux plus récents. Concernant les fonds ISR, la crise de 2008 a induit une crise de confiance forte sur le marché financier. Le label de Novethic a joué à plein son rôle (forte augmentation des fonds labélisés). Mais il y a eu un effet d’abord plus quantitatif (augmentation du nombre de fonds labélisés) que qualitatif (les fonds labélisés ne cherchent pas à surperformer les critères extra-financiers imposés par le label).

La situation du secteur lors de l’après-crise financière de 2008

Pour Finansol, il y apparait plus facile de faire le lien avec le grand public et la finance solidaire. Ainsi, la crise ayant fait naitre des comportements plus engagés, voire militants, l’impact devrait se conforter plus facilement lors de l’après-crise. Mais il existe des limites à une appropriation plus généralisée de la finance solidaire : certains fonds ne sont pas directement proposés à l’épargnant et la finance solidaire n’est toujours pas suffisamment démocratisée auprès du grand public (seulement 3,5 milliards d’encours labélisés pour Finansol contre 149 milliards d’encours utilisant des pratiques ISR d’après Novethic). La finance éthique au sens de Novethic n’est pas en prise directe avec les épargnants. Il y a de nombreux intermédiaires financiers. On est dans un marché d’offre : ce sont les sociétés de gestion qui fond des propositions aux institutionnels majoritairement. La rentabilité financière est importante concernant la finance éthique. L’effet crise a marqué beaucoup plus les acteurs du secteur financier que les épargnants directement puisque ceux-ci ne sont pas en prise directe avec l’offre de fonds éthiques.

Les grands enjeux du secteur à moyen terme

L’impact de la crise de 2008 a été réel sur les encours qualifiés de responsables. Le contexte d’instabilité et de crise de confiance explique cette tendance. Mais les éléments nécessaires pour pérenniser une réelle appréciation durable de la finance responsable devraient passer par les éléments suivants : poursuivre le développement des labels (communication, outils de performance extra-financière, rencontre de partenaires…) ; redéfinir la structuration actuelle des intermédiaires financiers afin de rendre transparent et lisible les choix des épargnants français ; développer encore plus les synergies entre Finansol et Novethic afin de faire levier sur les épargnants avec des profils pas toujours similaires ; continuer à proposer des outils innovants (démarche de recherche-action à poursuivre dans l’aide à la structuration du secteur, notamment avec le développement des assurances-vie et autres), du travail de collaboration/échange avec la finance traditionnelle (effet de débordement positif) ; appréhender les enjeux européens de la finance responsable (dans un monde financier globalisé, les labels ont vocation à gagner en visibilité)…

 

Les principaux éléments de cet entretien de groupe confortent le rôle conjoncturel de la crise financière dans l’augmentation des encours labélisés finance responsable. Cette appropriation par les acteurs a reflété un besoin de sécurisation et d’implication sociétale du rôle des actifs (on peut parler de crise de confiance dans le marché financier à partir de 2008). Deux des trois spécificités de la finance responsable sont directement mentionnées : la plus faible volatilité des encours responsables et des actifs créateurs de valeurs sociétales. La possibilité par l’épargne d’abonder des fonds dans le financement de structures solidaires a joué fortement. Il y a eu un relais médiatique plus fort vers le grand public au regard de la transformation de la crise financière en crise économique avec l’augmentation de la précarité : pauvreté, chômage, logement... La crise a permis parallèlement de structurer le secteur en confortant le rôle d’information qu’ont pu apporter les labels. Il y a eu un besoin de reconnaissance et de lisibilité sur le marché avec une plus forte communication des acteurs financiers autour des labels et de leur rôle sociétal (aspect commercial /stratégie de différenciation). La crise financière a fait de la finance responsable un courant dominant.

Conclusion

Ce travail a consisté à questionner les stratégies d’allocation du patrimoine financier des ménages français en temps de crise. Historiquement, l’orientation des actifs financiers a pour habitude d’être répartie vers des supports plus stables pour éviter des pertes potentielles en capital. L’émergence forte des encours appartenant à la finance responsable (qu’elle soit éthique ou solidaire) lors de cette période de tensions financières a pu interpeller les stratégies de gestion du risque. Le besoin apparent de transparence, de compréhension et d’utilité dans l’épargne allouée au marché financier a été envisagé. Pour autant, il n’est pas sûr que cette tendance soit confortée lors de l’après-crise. Le travail de revue de littérature a eu pour objet de lister les caractéristiques aujourd’hui admises de ces produits financiers. Même s’il n’existe aucune étude sur le profil des épargnants « responsables », ces éléments ont permis d’incrémenter les hypothèses soulevées vis-à-vis des stratégies de répartition de ces actifs par les ménages. Ont-ils orienté leur patrimoine financier vers ces actifs responsables afin de bénéficier d’une certaine stabilité des encours, d’une rentabilité comparable à moyen terme, ou d’un besoin de donner du sens à leur épargne ? C’est surtout la volonté de stabiliser la valeur de son capital et la différenciation de ces actifs responsables dans un contexte de crise de confiance qui ont surtout émergé. La question de la rentabilité n’a été que secondaire, justifiée dans un marché financier globalement baissier. La fiscalité n’a pas été significative dans le cadre de ce travail. La crise financière de 2008, à l’origine d’une augmentation des encours responsables, n’a pas été impulsée par des modifications liées à la fiscalité des produits financiers des ménages. Cependant, les réflexions en cours portées par les pouvoirs publics dans le domaine, qu’il puisse s’agir de fonds responsables ou non, laissent entendre des mutations fortes du secteur qu’il conviendra d’appréhender.

La pérennité de cette dynamique conjoncturelle à terme se pose. La finance solidaire est plus à même de capitaliser sur l’effet de la crise. Un accès plus direct aux épargnants, une rentabilité qui n’est pas une priorité et une relative stabilité des actifs (majoritairement non cotés en bourse) sont autant d’éléments allant en ce sens. Cependant, la finance solidaire est beaucoup moins importante que la finance éthique (3,5 milliards d’euros solidaires entre 149 milliards d’euros éthiques en 2012). Les enjeux relatifs à la finance solidaire porteront principalement sur sa capacité à se démocratiser, et notamment auprès des acteurs financiers plus traditionnels. La finance éthique quant à elle, interpelle à plusieurs égards vis-à-vis de l’après-crise. Le marché de l’ISR étant un marché d’offre, c’est surtout les gestionnaires de fonds qui détermineront l’évolution à terme de ce marché. Souhaiteront-ils continuer à proposer des fonds ISR ? Les enjeux se situeront d’abord auprès des acteurs financiers plutôt qu’auprès du grand public. Il s’agira alors de démontrer plus encore la pertinence d’une gestion responsable auprès de ces acteurs.

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