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Résumé :

Cet article traite de « l’argument du seigneuriage » en faveur de l’émission publique de monnaie, en vertu duquel les finances de l’État pourraient être améliorées si celui-ci exerçait plus pleinement le privilège de création monétaire – privilège qui, pour une large part, est aujourd’hui exercé par les banques privées. Cet argument fut avancé dans les années 1930 par plusieurs partisans du plan de réforme « 100% monnaie » – tels qu’Henry Simons de l’Université de Chicago, Lauchlin Currie de Harvard, ou Irving Fisher de Yale –, qui réclamaient une couverture intégrale des dépôts en comptes courants par des réserves en monnaie légale. L’un de leurs arguments était, qu’en rendant à l’État l’intégralité du profit de seigneuriage, une telle réforme permettrait de réduire considérablement la dette publique. Dans les débats académiques, cependant, suite à une critique originellement formulée en 1935 par Albert G. Hart de l’Université de Chicago, cet argument fut largement rejeté comme purement illusoire. Hart affirmait que, parce que l’État, sous un « système 100% », serait probablement amené à subventionner les banques pour assurer la tenue des comptes courants, aucune réduction notable de la dette publique ne pourrait en résulter. Les partisans du « 100% monnaie » n’ont jamais répondu à cette critique, dont la conclusion a souvent été considérée comme définitive au sein de la littérature. Cependant, une étude approfondie de la question révèle que l’analyse de Hart apparaît contestable à au moins deux égards : l’un ayant trait aux sources du profit du seigneuriage, l’autre à sa répartition. Nous en concluons que l’argument du seigneuriage avancé par les auteurs du « 100% monnaie » n’était pas entièrement infondé.

Mots-clés : Seigneuriage, Dette publique, Création monétaire, 100% monnaie, Plan de Chicago, Irving Fisher.

Abstract:

This paper discusses the “seigniorage argument” in favor of public money issuance, according to which public finances could be improved if the state more fully exercised the privilege of money creation, which is, today, largely shared with private banks. This point was made in the 1930s by several proponents of the “100% money” reform scheme, such as Henry Simons of the University of Chicago, Lauchlin Currie of Harvard and Irving Fisher of Yale, who called for a full-reserve requirement in lawful money behind checking deposits. One of their claims was that, by returning all seigniorage profit to the state, such reform would allow a significant reduction of the national debt. In academic debates, however, following a criticism first made by Albert G. Hart of the University of Chicago in 1935, this argument has generally been discarded as wholly illusory. Hart argued that, because the state, under a 100% system, would be likely to pay the banks a subsidy for managing checking accounts, no substantial debt reduction could possibly be expected to follow. The 100% money proponents never answered Hart’s criticism, whose conclusion has often been considered as definitive in the literature. However, a detailed study of the subject reveals that Hart’s analysis itself appears to be questionable on at least two grounds: the first pertains to the sources of the seigniorage benefit, the other to its distribution. The paper concludes that the “seigniorage argument” of the 100% money authors may not have been entirely unfounded.

Keywords:

Seigniorage, Public debt, Money creation, 100% money, Chicago plan, Irving Fisher.

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